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Article traçages

 

EKS Hydrogéologie

Mesure en continu et in situ des traceurs pour les traçages artificiels et naturels

Interprétation des courbes de restitution perturbées par des précipitations

 

1  Courbes de restitution normales de traçages artificiels

La plupart des courbes de restitution ont une forme normale. Les courbes sont la somme de un ou plusieurs pics conformes au modèle "advection – dispersion". Dans ces cas, la détermination des caractéristiques du traçage et des paramètres hydrodispersifs est aisée (Lepiller et al., 1986).

Les courbes du présent article ont été obtenues avec un procédé de traçage caractérisé par une surveillance automatique en continu et in situ du traceur : TRACEAUTOâ (procédé breveté, marque déposée). Cette technique de traçage n'a aucun impact sur l'environnement. Cela est un avantage énorme par rapport à l'emploi des colorants qui sont polluants pour l'environnement et dangereux pour la santé humaine.

Nous donnons ci-dessous deux courbes de restitution classiques (qui sont la somme de deux pics élémentaires conformes au modèle "advection – dispersion". Une mesure toutes les minutes a été effectuée. Les 7 000 concentrations de ces courbes sont des mesures brutes fournies par l'appareil. Aucun traitement de données (moyenne ou autres) n'a été appliqué pour obtenir les courbes de cet article.

Traçages avec des courbes de restitution normales (source de Font Froide, procédé TRACEAUTO)

Les courbes précédentes présentent des imperfections dues au format GIF. Les originaux sont parfaits, sans aucun bruit de fond. La figure originale peut être envoyée sur demande à eks@hydrogeologie.com

La qualité des mesures est prouvée par l'agrandissement du pic. Le bruit de fond est quasi éliminé. Le maximum de concentration est déterminé avec la précision voulue (ici à 30 secondes près, dans d'autres cas à 2,5 secondes près). L'arrivée du traceur peut être donnée avec la même exactitude. Dans certains cas, les vitesses sont déterminées avec une précision de 0,01 %.

La courbe de restitution est présentée sous la forme de la Distribution des Temps de Séjour (DTS) car cette représentation a de nombreux avantages. Il s'agit d'une courbe normée, tracée en j-1. L’intégrale de la courbe (surface sous la courbe) vaut 1. Elle permet de comparer les résultats de plusieurs traçages avec une même échelle. Elle ne dépend pas de la quantité de traceur injectée. La DTS contient la plupart des informations sur le traçage (vitesses, forme de la restitution, dispersion). Elle dépend peu de la précision sur les mesures de concentration. (La DTS est calculée sans tenir compte du débit)

 

2  Courbes de restitution perturbées

Cependant les courbes sont quelquefois anormales, avec de brusques variations de concentration en traceur.  Sur 120 traçages réalisés avec le procédé TRACEAUTOâ, seuls trois traçages donnent des courbes singulières. Ils présentent une montée normale de la concentration en traceur, puis un pic bref, suivi d'une brusque descente de la concentration.

Traçage avec une courbe de restitution perturbée (source de Font Froide, procédé TRACEAUTO)

Ces brusques montées et descentes de la concentration sont décelables par la mesure en continu et in situ du traceur. La concentration peut baisser de moitié en 10 minutes. Ce qui justifie le choix d'une mesure de concentration en traceur toutes les minutes.

Dans les traçages classiques avec prises d'échantillons et analyses en laboratoire, ces variations sont souvent ignorées. En effet le pas d'échantillonnage peut être trop grand pour détecter le phénomène rapide, ou le laboratoire peut "corriger de lui-même les résultats anormaux", ou la personne exploitant le traçage peut supprimer les quelques "valeurs aberrantes". Avec la mesure en continu, il est impossible de supprimer des centaines ou des milliers de mesures réelles pour "arranger" une courbe.

On pourrait attribuer ces brusques variations à un défaut du procédé de traçage. Cependant la qualité reconnue avec plus de 100 traçages et la précision des courbes données en début d'article ne confirment pas cette hypothèse. De plus, ce phénomène se rencontre dans tous les types de karst, pour tous les débits et quel que soit la durée de restitution (voir le tableau ci-dessous). Ces variations sont donc indépendantes du procédé de traçage utilisé.

TRAçAGE

Source de Font Froide

Trou de l'Aygues

Sources du Gard

Département (région)

Rhône (Beaujolais)

Drôme (Vercors)

Gard

Débit moyen

1 l/s

100 l/s

2 750 l/s

Durée restitution

0,5 jour

10 jours

50 jours

Type de karst

Karst de plaine

Karst de montagne sans zone noyée importante

Karst méditerranéen avec zone noyée importante

Traçage avec une courbe de restitution perturbée (Fontaine de la Plante, procédé TRACEAUTO)

Traçage avec une courbe de restitution perturbée (Source de Gardon, procédé TRACEAUTO)

3 Courbes de restitution de traçages naturels

Les traçages naturels ne comportent pas d'injection artificielle de traceur.

Traçages naturels 

La courbe ci-dessus montre deux pics ou un "creux". Chaque événement est lié à un épisode de précipitations (observations réelles et relevés de Météo France). Cependant les réactions de l'aquifère à la pluie sont opposées. Les précipitations 1 et 3 entraînent de belles courbes de restitution avec une montée de concentrations en halogènes (Cl-, Br-, I-). La deuxième précipitation entraîne une courbe de restitution à l'envers avec une baisse de la concentration (et sans aucun doute la minéralisation totale de l'eau).

Cette différence de comportement de l'aquifère est due aux caractéristiques des événements pluvieux. La première pluie est continue et de faible intensité. La température de l'eau ne varie pas. L'eau entraîne les chlorures stockés dans le sol (et dissout les pierres à sel placées en amont de la source par des éleveurs).

La deuxième pluie est un violent orage. La baisse de concentration est due à la dilution par l'eau de l'orage non minéralisée. Cette arrivée d'eau de pluie est confirmée par la baisse brutale de la température de l'eau, exactement en même temps (nous sommes au début de l'automne en période de forte baisse de la température atmosphérique).

Le troisième épisode de précipitations est continu, mais plus long et de plus forte intensité que le premier. Il entraîne une courbe de restitution plus importante avec des variations de la température de l'eau.

Un même aquifère peut donc avoir à la fois un fonctionnement en dilution et en concentration. Le type de fonctionnement hydrochimique n'est pas une caractéristique d'un système karstique. Dans le cas de la source de Font Froide, c'est une caractéristique de l'événement pluvieux.

 

4  Interprétation des courbes de restitution perturbées

La mise en évidence de la "courbe de restitution à l'envers" dans le traçage naturel à l'eau de pluie donne une explication pour les courbes perturbées. Les brusques baisses de concentration en traceur sont dues à une dilution par l'eau, moins minéralisée et non tracée, des précipitations. Sur la courbe de restitution du traceur se dessine une (ou des) courbe de restitution en sens inverse. Ceci est particulièrement visible sur le traçage du Gardon où la concentration remonte systématiquement après chaque baisse.

D'autres phénomènes sont visibles sur les trois courbes perturbées :

·         La concentration en traceur monte brièvement avant la brusque descente.

·         Le maximum atteint est plus élevé que le maximum qui aurait été atteint pour une courbe normale.

Ces comportements sont paradoxaux, surtout le deuxième. Comment, en un point, peut-on atteindre une concentration en traceur supérieure à un comportement normal ?

Une explication envisageable est la remobilisation d'une partie du traceur stocké dans l'aquifère. Pourtant ces variations de concentration ne sont pas toujours liées à des variations de débit et elles sont présentent dans des grandes zones noyées. Nous ne considérons pas cette hypothèse comme la bonne.

Notre explication est de raisonner à la fois dans le temps et dans l'espace en utilisant la fonction mathématique du modèle "advection – dispersion". A débit et caractéristiques hydrauliques constantes, cette fonction donne la concentration en traceur pour toutes les valeurs de l'espace et du temps. La dérivée de cette fonction montre que le maximum de concentration baisse quand la distance au point d'injection augmente et quand le temps augmente. Le maximum "perturbé" est donc le maximum d'un point qui aurait été plus près du lieu d'injection (s'il n'y avait pas eu de précipitations), qui a été "poussé" par l'eau de la pluie.

 

5  Applications de ces résultats et conclusion

La compréhension de ces courbes perturbées peut servir à retrouver la courbe normale. Celle qui aurait du être enregistrée s'il n'y avait pas eu de précipitations. On peut effacer le pic bref et les "courbes de restitution à l'envers" pour tenter d'exploiter un traçage perturbé. La coûteuse opération de traçage donnera alors une estimation des résultats importants : temps et vitesses moyennes, volume tracé, coefficients de dispersion…

 

Le maximum perturbé supérieur au maximum normal a des conséquences environnementales. La pointe réelle du traceur (ou d'un polluant) peut être 20 à 50 % plus forte que la prévision des modèles mathématiques de transport des polluants (à débit et volume constants). Pour la protection de l'alimentation en eau potable, il est donc nécessaire de prendre un fort coefficient de sécurité dans le calcul les concentrations admissibles dans les captages (pour tenir compte de toutes les conditions climatiques possibles au moment de l'arrivée d'une éventuelle pollution).

Ce phénomène de variations dues aux précipitations peut fournir des informations sur le fonctionnement de la zone noyée du karst. Dans une même courbe, on a en fait les résultats de plusieurs traçages. Par exemple pour le traçage du Gardon, on remarque deux "creux" successifs alors qu'il n'y a eu qu'un seul épisode de fortes précipitations. On peut donc envisager un drain principal dans la zone noyée où circule normalement le traceur, avec deux affluents locaux différents. Les temps séparant la pluie unique des "creux" permettent de calculer les distances de ces affluents au point de surveillance. Bien sûr de telles interprétations nécessitent d'être vérifier par des traçages artificiels caractérisant ces hypothétiques affluents dans la zone noyée.

En conclusion, cet article montre le grand intérêt de la mesure en continu et in situ des traceurs artificiels ou naturels. Les informations obtenues sont d'une qualité nettement supérieure à celles des traçages classiques (prise d'échantillons d'eau et analyses ponctuelles).

 

Les traçages du Trou de l'Aygues et du Gardon sont des prestations de services réalisées par la société E. K. S. Hydrogéologie, avec un financement usuel : Agence de l'Eau Rhône-Méditerranée-Corse, Etat, Conseils Généraux, Syndicats, Communes… Le travail de recherche et les autres traçages ont été financés à 100 % par l'auteur de l'article et par E. K. S.

 

BIBLIOGRAPHIE

DUCLUZAUX B., 1997 : Impacts des colorations sur l'environnement. Scialet 26; p. 132-135.

LEPILLER et al., 1986 : Les traçages artificiels en hydrogéologie karstique. Hydrogéologie, n°1, 1986, p.32-52.

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